Saint-Louis la "belle endormie" nous avait laissé lors de notre passage en juillet 1989 le souvenir d'une chaleur accablante. Et bien nous n'avons pas été déçus. Le thermomètre, qui flirtait déjà avec les 32-33 degrés à Dakar, est monté ici allègrement à 39° dans l'après-midi avec, heureusement, moins d'humidité en ce début novembre 2022. Un peu de vent permet aussi de mieux supporter cette température. Mais on comprend l'ambiance quelque peu léthargique qui peut régner dans la ville.
La route est longue entre Dakar et Saint-Louis mais le spectacle est permanent et chaque ville traversée a sa spécialité : motos, chaussures à Meckhe, poteries etc. En campagne, il n'est pas rare de croiser un troupeau de zébus et de chèvres.
Aux confins du désert du Sahara, tout au nord du pays, la ville de Saint-Louis, ancien comptoir et capitale du Sénégal jusqu’en 1957, est posée sur des bancs de sable entourés par les eaux, avec l’océan Atlantique d’un côté et le fleuve Sénégal de l’autre. Prospère jusqu'au milieu du XXème siècle grâce au commerce de la gomme arabique, la traite négrière et l'Aéropostale, elle a depuis sombré dans une douce torpeur. Inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, le vieux quartier de l’île, joyau de l'architecture coloniale relié par le pont Faidherbe à la route de Dakar, a conservé tout son charme avec ses anciennes bâtisses aux façades ocres, oranges ou rouges, ornées de balcons de bois ouvragés ou de balustrades de fer forgé.
Face à l'île de Saint-Louis, de l’autre côté du pont Malick-Gaye, le village de pêcheurs du Guet N’Dar, à l'activité trépidante, occupe toute la partie sud de la Langue de Barbarie, entre mer et fleuve. C'est en calèche et avec un guide de l'office du tourisme que nous l'avons visité. Beaucoup d'animation, de bruit et d'odeurs dans les rues et ruelles de ce quartier où se bousculent piétons, chèvres, vélos et carrioles à cheval. Au bout, le port de pêche où les femmes font sécher les poissons au soleil ou les préparent à la vente et où se négocient au meilleur prix les prises du jour. En langue Wolof, Ndar signifie Saint-Louis.
La montée des eaux menace Guet N'Dar
Coincé entre l'océan qui monte et le fleuve qui déborde, Guet N'Dar est menacé depuis plusieurs années : de nombreuses maisons ont déjà été détruites à cause des vagues et les pêcheurs du quartier sont devenus les premiers réfugiés climatiques du pays. Mille d'entre eux ont dû être relogés dans un camp appelé Diougop et vivent dans la misère, à 11 km de Saint-Louis (article de Thieydakar). Une digue de plus de trois km de long a donc été construite en urgence en 2019 pour servir de rempart contre les assauts de l'océan, avec le soutien de l'Agence française de développement.
Construite sur une île près de l'embouchure du fleuve Sénégal, Saint-Louis est considérée comme l'une des villes africaines les plus exposées à la montée des océans. L'érosion emporte 2 m par an.
Ouvert fin 2017 et principalement installé dans une belle demeure coloniale, ce musée privé se découvre également dans cinq annexes différentes et sur les murs du quartier sud de Saint-Louis, rappelant l'émergence des pionniers de cet art dans la cité sénégalaise.
Notre coup de coeur au Sénégal !
Une belle demeure (nous y avons passé deux nuits, les 1er et 2 novembre 2022) et une belle rencontre... On ne peut que succomber au charme de la maison d'hôtes "Au fil du fleuve" dont le nom fait déjà rêver, située dans le quartier sud du centre historique de l'île de Saint-Louis. Ancien entrepôt de gomme arabique datant du 19ème siècle entièrement restauré dans les règles de l'art entre 2007 et 2010, c'est aujourd'hui une demeure magnifiquement entretenue et pleine d'objets et de livres dans laquelle on regrette de ne pas rester plus longtemps tellement on s'y sent bien. La mini-suite est très confortable, la salle de bain pleine de petites attentions et le petit déjeuner, exceptionnel, composé de produits locaux et d'un nombre impressionnant de confitures maison, permet de découvrir différentes saveurs sénégalaises.
Mais plus que la maison, c'est le chaleureux et généreux accueil de Marie-Caroline Camara, toujours disponible et prête à rendre service ou à répondre à nos questions, qui rend le séjour inoubliable. Véritable ambassadrice de la culture saint-louisienne, elle nous fait partager son amour pour la ville ainsi que ses connaissances sur le Sénégal. Quel plaisir d'échanger avec elle !
Ne pas rater le convivial apéro du soir offert par Marie-Caroline, qui permet aussi de faire connaissance avec les autres voyageurs.
Juste à côté de la maison d'hôtes Au fil du fleuve de Marie-Caroline Camara, rue Ribet, se trouve l'atelier de Meissa Fall, un artiste autodidacte qui recycle les vieux vélos et les transforme en oeuvres d'art. Sur le mur extérieur est accroché un criquet géant, sa première sculpture, et dans son minuscule atelier, une montagne de cycles hors d'usage attendent patiemment leur sort : avion, oiseau, poisson, petit personnage... que vont-ils donc devenir ?
Les 4 vies du pont Faidherbe
Succédant au bac de "Bouetville" inauguré en 1858 qui effectuait jusqu'à 10 rotations par jour du lever au coucher du soleil avec à son bord 150 personnes, des boeufs, des chameaux, des marchandises et des voitures... le premier pont Faidherbe (1865/1897) qui doit son nom à un décret impérial et qui sera inauguré le 2 juillet 1865, était un pont flottant. D'une longueur totale de 680 m dont 355 m pour la partie immergée, il comprenait 40 pontons en tôle supportant un tablier en bois de 4 m seulement. Une portière de trois pontons et 20 m de large permettait le passage des navires.
Il est remplacé après 32 ans de services par un deuxième pont Faidherbe (1897/1933) long de 508,3 m, qui sera inauguré deux fois : le 14 juillet 1897 par le gouverneur Chaudié et le 19 octobre 1897 en présence du Ministre des Colonies Lebon.
Le troisième pont Faidherbe (1933/2011) est la conséquence d'une réhabilitation (par Daydé, 1929-1933) souvent passée sous silence mais rendue indispensable par l’impossibilité technique de remettre en état le pont et qui équivaut, en temps et en argent, à une véritable reconstruction. La totalité des poutres a notamment été remplacée et une chaussée bétonnée a succédé à l'ancien platelage.
Le quatrième pont Faidherbe a quant à lui été refait de fin novembre 2008 à 2011 (858 jours de travail) et inauguré le 19 novembre 2011.